- Elle était d’une douceur, tu sais…
Je n’en doutais pas et je ne
savais pas quoi lui répondre… Quels mots pouvais-je bien trouver pour réconforter cette
infirmière qui venait de perdre sa collègue et qui devait pleurer derrière son
écran en m’écrivant son message ? « Elle était douce Elo’ », vous avez
été plusieurs à me l'écrire...
Elodie était infirmière à l’hôpital
psychiatrique de Thouars et le 13 février dernier, un de ses patients l’a poignardé.
Elle est décédée malgré l’intervention de ses collègues.
La douce Elodie…
Je ne regarde plus trop les
médias, mais j’ai cru comprendre qu’ils n’en avaient pas beaucoup parlé à la télévision. Un peu sur le net peut-être, mais sans plus. Il semblerait qu'on préfère parler de coronavirus et de branlette sur internet, que du meurtre d'une infirmière... Loin de moi l’idée de faire des raccourcis ou de comparer des professions qui n’ont rien en commun (si ce n’est que ce sont des
métiers de la fonction publique) mais ça me peine de me dire qu’on parlerait d’avantage
d’un militaire tué en mission, d’un pompier assassiné dans ses fonctions ou d’une
prof poignardée en pleine classe… La violence dans les soins n’a rien de
nouveau et c'est devenu tellement banale qu'il semblerait que les médias ne soient plus à un coup de couteau
près. Et puis, en tombant sur une vidéo de l’Assemblée Nationale, j’ai compris.
On y voit la député Caroline Fiat
réclamer une minute de silence en s’indignant qu’aucun hommage n’ait été rendu à
Elodie par les représentants de l’Etat. Elle voulait prendre cette minute sur
son temps de parole, mais Richard Ferrand, le Président de l’Assemblée, le lui
a refusé pour le motif que le meurtre d’Elodie, n’était pas un cas « exceptionnel
et solennel ». Tout est dit. Accorder une minute de silence n’aurait rien coûté à l’Assemblée Nationale, et ça aurait pu leur faire gagner un peu d'humanité. Mais il semblerait que le Gouvernement n’est même pas le budget pour
un acte gratuit de bienveillance…
Alors je suis allée voir du côté
d’Agnès Buzyn alors encore Ministre de la santé. Il y a bien un tweet : « j’adresse
mes pensées à la famille de l’infirmière décédée, ainsi qu’à ses proches ».
Décédée, ce terme m’a fait grimacer. Madame Buzyn, Elodie n’est pas morte en heurtant
un coin du bureau de sa salle de soins par « accident ». Elle a été
assassiné par un de ses patients dans le cadre de sa fonction. Appelons un chat
un chat et ce décès, un meurtre. Et puis, c’est pas si comme depuis cet été, le
service d’Elodie n’avait de cesse d’alerter leur direction pour dénoncer le
manque de moyens et de la possible dangerosité de leurs conditions de travail. C'est ce que m'ont rapporté ses collègues après m'avoir dit combien "elle était douce Elo', si tu savais"... La Ministre n'en savait rien. Ses condoléances ont été rédigés quatre jours avant qu’elle
ne quitte ses fonctions et l’hôpital public en pleine crise pour lui préférer
la conquête de Paris. Courage, fuyions ! Elodie, elle, n’en a pas eu le temps...
Alors, devant l’absence totale de
reconnaissance de nos hautes instances, nous avons décidé entre nous, entre soignantes, de t’offrir
une minute de silence rien qu’à toi. C’était aujourd’hui, le jeudi 20 février à
14h30, jour de ta sépulture.
Tu t’appelais Elodie. Tu avais 30
ans et tu étais infirmière, au service de l’Etat, de tes patients et de tes
collègues. Tu étais maman de deux jeunes enfants, tu étais aimée et tu as été
assassinée dans l’exercice de tes fonctions de soignante. Aujourd’hui, tes proches
te disaient au revoir. Et nous, même si on ne te connaissait pas Elodie, tu
sais, on a beaucoup pensé à toi.
A la douce Elo'...
(suite à une attaque massive de brouteurs, arnaqueurs et autres méchants du web envahissants les commentaires sous les articles, j'ai du me contraindre à enlever la possibilité de laisser des commentaires... Et j'en suis bien désolée !)