J’y réfléchis depuis plusieurs jours et j’ai dû me rendre à l’évidence : le FlashMob Postal n’a pas fédéré autant qu'il aurait dû. Pourtant j’y ai cru, bordel, mais tellement…
Je pensais avoir trouvé une solution simple pour nous faire entendre. Un nouveau moyen pour nous rassembler, bon ok, chacun chez soi, mais un peu ensemble quand même. Un outils unique pour faire remonter au plus haut un ras le bol de soignant qui dure depuis trop longtemps… Ecrire au Président. C’était tellement fou.
Après un démarrage complètement dingue (Plus de 3500 participants dès le 2ème envoi). De nombreuses infirmières de structure ou du libéral ont envoyé leurs courriers au Président. Les étudiants et les aidants nous ont rapidement suivi moyennant un courrier, encore une fois modifié pour eux…
Il y a eu vos photos géniales. Vos sourires de guerrières derrières vos selfies-cernes. Toutes vos lettres empilées en tas parfois bien épais. J’y ai cru, vraiment. J’ai pensé que ça décollerait mais l’engouement est retombé… Pour enregistrer à peine plus de 600 participants au 6ème FlashMob Postal.
Alors que nous sommes plus de 600 000 infirmières en France.
600 participants....
Qu’est ce que j’ai foiré ?
Je te promets, je me pose cette question depuis des jours, des semaines pour être honnête. J’essaie de comprendre où j’ai merdé. Le courrier mal foutu ? Le manque de relance de ma part ? La fatigue qui m’empêche de vous motiver ?
Depuis le 1er FlashMob Postal du lundi 8 octobre, j’ai reçu beaucoup de messages. Plus de mille je pense. De soutien pour la plupart. Mais dans le lot il y a eu des menaces. Des insultes. Des menaces de mort où l’on me disait qu’on allait « me cramer et m’égorger ». Des messages où l’on me disait que je faisais dans le « bobo des villes macronien » avec mon écriture inclusive. Des messages où l’on me disait que j’avais perdu ma flamme et qu’au lieu de faire dans le mignon, je faisais dans le politique et que j’avais déçu « T’écris plus rien sur tes patients, t’es devenue une infirmière à fric ! ». D’autres qui me disaient que je rendrais service aux autres à me reconvertir. Tu sais, j’ai pleuré des fois de les lire ces mots durs. Même si ils étaient rares. Moi, je voulais être utile à ma profession. Je voulais juste aider à faire entendre la voix des collègues. Je me suis trompée, je n’en ai pas les capacités.
Pour avancer, mieux vaut ne pas tenir compte de ceux qui vous freinent.
C’est le genre de mantra qui ce soir ne me motive plus.
J’ai pris la décision d’arrêter le FlashMob Postal. Je suis épuisée. Je n’y arrive plus. J’ai l’impression de perdre un peu ce qui me donnait envie de gueuler à la face du monde que ce putain de métier est tellement beau qu’il mérite qu’on se batte pour le faire exister aux yeux des autres. Mais ce soir, je n’y arrive plus… J’ai cru aux députés, j’ai cru aux médias, j'ai cru en mes collègues. J’ai passé 6h avec une équipe de France 2 qui au finale ne diffusera probablement pas le reportage de 2min au JT pour cause d’actualité. Parce que le mal-être des soignants n’est plus d’actualité. Je me demande même s’il a au moins été un jour… Nos conditions de travail n'intéressent personnes. Pas même les premiers concernés : les soignants.
Je vais faire une pause. Me recentrer. Lâcher un peu tout ça. Prendre du recul sinon, je sens que je vais perdre cette flamme qui m'aide depuis toujours à m’insurger contre ce que je ne trouve pas juste. Et c’est ce qui forge une partie de mon caractère. Je ne veux pas le perdre…
Mais avant de partir un peu, je voulais te dire merci.
Merci à toi qui a fait partie des 18 000 autres participants des FlahsMob Postaux. Merci à toi d’avoir fermé cette lettre qui a rejoint les 60 000 autres. Merci à toi de m'avoir écrit des mots doux à m’en brouiller les yeux. De m'avoir confié tes conditions de travail qui te font perdre pied. Merci à toi de m’avoir dit « J’ai l’impression de faire quelques chose d’utile pour la 1ère fois en écrivant au Président ». Merci à toi d’avoir été là et d’y avoir cru comme moi. MERCI.
Le FlashMob Postal n’est pas mort. Les courriers existent toujours et ils vous appartiennent. Vous pouvez continuer de les envoyer, vous pouvez en rire, souffler dessus en vous disant que ça ne servira à rien. Ils sont à vous. Ils sont pour vous.
On trouvera une solution. Celle-ci n’était peut-être pas la bonne c'est tout, mais on trouvera. Parce que j’ai envie d’y croire encore un peu.
Je vous embrasse. Prenez soin de vous. Ne vous oubliez pas. ❤
PS : Je vais continuer de faire ce que je fais depuis le départ sur cette page : écrire quand j'en ressens le besoin, sans pression ni rien. Si dernièrement il n'y a plus d'article c'est uniquement parce qu'il ne se passe "rien" dans mes tournées qui méritent d'être partagées ici. Pour les déçus qui se sont permis de me dire que j'avais oublié pourquoi j'avais ouvert ma page je répondrais que j'écris avec le cœur et que c'est un organe pour lequel je ne peux rien imposer. Pour l'instant il est tourné vers un livre et je me plais à passer du temps à l'écrire...
PS bis : Je continuerai de partager vos brèves rien qu'à vous avec votre mal-être dedans. Parce que vos mots sont beaux et douloureux et parce qu'ils ont besoin d'être lu pour ne pas être oubliés. J'ai du retard, j'en suis navrée. Je reçois une trentaine de messages par jour, je suis un peu dépassée
PS ter : 🧡