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vendredi 1 septembre 2017

La Réa, pas la Réa !!



- Mais qu'est ce qui vous a fait quitter l'hôpital ?
- La réa !!

C'est sorti aussi net de ma bouche. Pour dire vrai, je pensais répondre quelque chose de plus construit à la journaliste (ce que j'ai fait par la suite) mais le premier mot qui est sorti de ma bouche tenait en 3 pauvres lettres : R.É.A.

Je n'aime pas les cousins (oui les cousins, je sais), les cons, le foie de veau mais si il y a bien une chose que je déteste encore plus, c'est de travailler en réanimation. Et la nuit qui a suivi l'interview, j'ai bossé le temps d'un cauchemar, dans ce service là :

- Pour compenser de ne travailler qu'une semaine sur deux, vous allez travailler en plus en Réa Chirurgie.
- Mais je fais déjà des semaines de 60 heures en libéral c'est quasi un temps plein !

On m'a mis une blouse blanche sur le dos et puis moi, mes crocs et mon angoisse avons commencé à arpenter les longs couloirs de la réa. Des pousses seringues, les lignes à purger, des patients intubés qui ne parlent pas et des collègues qui parlent trop... Des produits à injecter, des calculs de dose à effectuer et moi qui me dit "Je vais finir par tuer quelqu'un si je me trompe !".

La peur d'avouer que je suis dyscalculique parce j'ai peur qu'on me retire mon diplôme d'infirmière pour dangerosité. C'est possible, dis, qu'on me retire mon diplôme parce que mon cerveau bug devant un chiffre ? C'est possible dis, d'être un danger pour les maths et une bonne infirmière quand même ? J'ai longtemps cru que j'étais juste bête, ne me dite pas maintenant que je suis dangereuse...

J'ai jamais voulu travailler en Réa moi, virez-moi cette blouse blanche et laissez moi retourner auprès de mes gens dans mon petit village. Loin des blouses, des bips, loin du stress des grands couloirs, des maths et de ces services dans lesquels je me suis sentie si bête...

J'ai fini par me réveiller, trempée. La peur aux tripes, l'angoisse au cœur... Je ne suis peut être pas douée en maths mais je suis sûr que la réa n'est pas pour moi, aussi sûrement que 1et 1 font 3.

mercredi 28 septembre 2016

Et j’ai le cœur qui saute.





- Oui, bonjour, excusez-moi de sonner chez vous aussi tôt mais je devais intervenir ce matin chez votre amie et elle ne répond pas. Ni à la sonnette, ni sur son fix ou son portable. Les volets sont fermés… Je sais que vous avez une clé. Je ne cherche pas à vous inquiéter mais si vous pouviez me la donner, ça me permettrait de m’assurer qu’elle va bien…


Les traits de son visage se sont tirés et j’ai vu naitre derrière son sourire accueillant l'angoisse naissante d’imaginer le pire pour sa vieille amie. Il m’a sorti la clé du tiroir de son bureau parfaitement ciré. Je ne me suis pas attardée et je l’ai quitté, lui et son sourire effacé.


« ‘Me fais pas ça, me fais pas ça, s’il te plait, pas toi… ».
 

Je suis remontée dans ma voiture pour me rendre au plus vite de l’autre côté du bourg. Tombée, inconsciente, morte… Endormie. Oui « endormie », c’est bien ça « endormie ». Même si tu es une lève-tôt, dis-moi que tu dors encore. Mon ventre s’est serré… J’ai laissé passer le tracteur qui me bloquait la voie et j’ai passé la première. Sur le trajet je n’avais de cesse d’analyser la situation avec toute l’ambivalence d’une bête à deux visages. Le visage de l’infirmière qui connait l’état de santé de sa patiente. Qui sait combien elle peut être mal en ce moment, qui sait que cette porte n’est normalement jamais fermée et qui sait qu’elle n’a jamais loupé un rendez-vous depuis toutes ces années. La soignante qui sait trop bien que ce genre de situation arrive, et pas qu’aux autres et qui sait que les patients ne se réveillent parfois jamais derrière leurs volets fermés. 


En regardant dans mon rétroviseur, j’ai croisé ce regard inquiet identique au vieil homme que je venais de quitter. J’y ai vu le visage de cette amitié qui, un jour, a pris le pas sur les soins techniques. Sur ces cotons imbibés d’alcool, sur ces garrots, sur ces plaies et sur ces mots susurrés entre nous comme des confidences qui n’avaient plus rien de médicales. La frontière entre ma bienveillance purement professionnelle et cette amitié que je ressentais envers elle était devenue aussi fine que la peau de sa main sur laquelle je m’évertuais à chercher une veine…  


« J’aurais dû intervenir plus tôt… J’aurais pu le faire vingt minutes plus tôt… J’aurais dû, pourquoi je ne l’ai pas fait ? … ».


J’ai garé ma voiture tout près et un peu à l’arrache devant chez toi. J’ai anticipé le pire en prenant avec moi ma mallette de soins, mon appareil à tension, mon saturomètre et mon restant d’optimisme que je n’avais pas encore dégluti avec ma boule de stress. Sur ta porte il y avait encore mon post-it sur lequel j’avais noté « Je repasse tout à l’heure ! » avec ce point d’exclamation joyeux que tu prendrais plaisir à découvrir en m’ouvrant ta porte d’entrée. Mais aux deux coups de sonnette, tu n’as pas répondu. J’ai décollé le post-it et je l’ai mis en boule dans ma poche en espérant que je ne retomberai pas tristement dessus ce soir en me déshabillant… J’ai inséré la clé dans ta serrure, d’abord dans le mauvais sens. C’est toujours pareil et j’ai pensé à toi et au jour où tu m’avais dit : « Mais pourquoi quand on ouvre une boite de médicaments on tombe toujours sur le côté où il y a la notice, c’est casse pied ! ». C’est casse pied oui, et ce matin moi, j’ai le cœur qui saute et qui se serre devant cette porte qui vient de s'ouvrir

La douce Elo'

- Elle était d’une douceur, tu sais… Je n’en doutais pas et je ne savais pas quoi lui répondre… Quels mots pouvais-je bien trouver...