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- Nan, mais c’est que vous avez vu, toute cette horreur… Mon Dieu…
Qu’est-ce que je pouvais bien
dire à ma vieille patiente de 92 ans ? Lui dire que son Dieu c’était de l’arnaque
et que je n’y croyais pas ? Lui dire qu’un mec appartenant à une catégorie socio-professionnelle aussi pointue
ne devrait pas laisser des poussettes se faire écraser un soir de fête
nationale ?
Elle a essuyé cette larme qui s’échappait
du coin de son œil, celui qui coule toujours tout seul : « Je ne m’arrête pas de pleurer depuis ce matin… Vous avez vu la
télé ? »
Oui j’avais vu.
J’ai vu les photos
du camion immobilisé au pare-brise criblé de balles. J’ai vu cette vidéo sur
laquelle je n’aurais jamais dû tomber mais qui s’est lancée toute seule sur mon
fil Facebook hier, tard dans la nuit. Celle où l’on voit quelqu’un filmer en marchant entre les
nombreux cadavres qui recouvraient le sol de la promenade des anglais de Nice, celle où l’on voit une mère morte aux côtés d’un tout
petit bébé mort, lui aussi. Celle où l’on voit une femme se balançant d’avant en
arrière en poussant des hurlements atroces en tenant dans ses bras le corps de
celui qui semblait être son jeune enfant… Je l’ai vu oui.
J’ai failli vomir
dans mon lit. Mon estomac s’est contracté, alors que j’étais sous ma couette, j’ai
failli dégobiller dans mon plumard alors que j’étais bien au chaud chez moi.
Alors que l’horreur se jouait à l’autre bout de la France…
Oui je l’ai vu et j’aurai préféré
ne rien voir et faire l’autruche sensible.
Et puis ce matin au réveil, j’ai
allumé mon téléphone, je suis retournée sur Facebook, pour prendre des nouvelles du pire, de ce qui m'avait empêché de dormir. Par besoin d'en savoir d'avantage, par nécessité de comprendre j'ai cherché... Et j’ai vu cette photo.
Celle du corps d’une toute petite gamine cachée sous une couverture de survie dorée avec en
premier plan ce poupon rose au regard figé vers le ciel, les yeux encore
ouverts. Encore ouverts alors qu’ils auraient dû être fermés…