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mardi 11 avril 2017

Le lilas couleur coeur.




- En Syrie, on a vu les photos terribles de ces enfants gazés…

J’ai coupé France Inter. Pas envie d’entendre. 

Pas envie d’avoir à nouveau en tête ces images terrifiantes d’enfants morts ou agonisants et suffocants, la respiration crépitante, les bras en croix. Des tout-petits, pas plus vieux que les miens… Dans ma cuisine, j’ai préféré couper ma radio pour ne pas entendre les infos et je me suis détestée de faire ça. Toute occidentale que je suis, j’ai eu d’un coup l’impression d’être loin de tout alors que la veille, mes larmes m’avaient rapproché des syriens à un point qu'ils n’imaginent pas.

L’Humanité part en vrille, et moi je coupe le son pour ne pas l’entendre. L’autruche, made in France.

Je sens dans mon cœur de soignante, dans mes tripes d’Humaine, dans mes viscères de mère qu’un changement dans l’Humanité est en train de s’amorcer, et pas dans le bon sens. On gaze les syriens. On exécute les homosexuels ou on les enferme dans des camps. On viole les femmes pour rembourser des crimes d’honneur ou on les mari de force. On excise, on mutile, on torture, on exécute...

J’ai l’impression que l’Humain perd pied alors qu’il devrait plutôt se le foutre au cul pour évoluer

Je suis sortie dans le jardin pour me changer les idées et j’ai pris ma fille sur mes genoux tout près du romarin en fleur. Je lui ai montré comment je caressais le dos des bourdons, avec gentillesse et douceur. Elle m’a dit :
- Tu n’as pas peur de lui ?
- Non, parce que je le connais et je sais qu’il ne me fera pas de mal…
- Mais il va te piquer !!

En remettant sa mèche de cheveux bruns derrière son oreille, je lui ai répondu :
- Aucun animal ne se lève le matin en se disant « Tiens aujourd’hui je vais piquer telle ou telle personne ! ».

Ma fille m’a très justement fait remarquer que c’était pourtant ce que je faisais dans mon travail d’infirmière tous les jours. J’ai continué :
- Si ce bourdon me fait mal, c’est que je n’aurais pas été assez douce avec lui… Parce que tu sais, aucun être vivant sur terre ne fait du mal par pur plaisir.

mercredi 1 avril 2015

Coup de cœur infi’ # 5 : " la vie des gens ", la beauté des autres.

Dernièrement je suis allée poser mes fesses sur le velours rouge d’un strapontin de cinéma. Il en fallait beaucoup pour me motiver à m’enfermer dans ce genre de salle tant ce qui s’apparente pour certains à un passe temps, peut vite s’assimiler pour moi à un calvaire. Mais il aurait fallu être difficile pour ne pas sauter sur l’occasion de découvrir le dernier film d’Olivier Ducray « La vie des gens », un documentaire traitant de notre métier d’infirmière libérale.


Avant de découvrir le film, j’avais quelques appréhensions. Je me demandais si l’infirmière choisie n’allait pas être trop caricaturale et si elle allait donner une belle image de notre profession. Je me suis demandée si j’allais me retrouver en elle ou si j’allais passer mon temps à souffler devant des pratiques qui ne me ressemblent pas.
La salle était quasi pleine, j’étais étonnée. Je ne m’attendais à voir autant de personnes intéressées par cette spécialité paramédicale de l’ombre. Je me suis installée, la salle s’est éteinte et je me suis laissée portée par les images défilant sur un rythme lent mais énergique. Un équilibre professionnel parfait sur lequel jongle l’héroïne du film : Françoise, une infirmière libérale suivi pendant un an dans son activité.  


Les premières minutes défilent avec légèreté, et la mise dans le bain en douceur est nécessaire à la découverte de la « tornade Françoise », une infirmière étonnante en fin de carrière se déplaçant en trottinette dans les rues de Lyon. Une vraie « étoile filante » comme aime l’appeler une de ses vieilles patientes. Françoise a sa pratique du soin qui lui est propre et j’avoue ne pas m’être toujours retrouvée en elle. Mais peu importe, le but n’était pas là. Peu importe l’idée que nous nous faisons de sa pratique ou l’image de notre métier que nous aimerions voir projeté sur les écrans de cinéma, nous ne pouvons qu’être touché par cette si jolie personnalité de soignante. Et s’il y a bien un point sur lequel je me retrouve, c’est le besoin, presque viscéral, d’agir auprès de nos patients avec humanité et respect. Je ne peux que remercier le réalisateur d’avoir su mettre à jour cette qualité primordiale qui, je l’espère, anime chacune des quelques 98 000 infirmières libérales de France. 

Le film progresse et je découvre des patients touchants, des personnalités brutes et incroyablement belles. Je crois que le réalisateur est parvenu à faire ce qu’aucun n’avait réussi avant lui : rendre beaux des corps vieillis et parfois abimés par la vie et la maladie, en permettant aux non-soignants d’apercevoir la beauté des gens, comme le permettrait le regard d’un soignant. Les intérieurs des appartements vieillis et parfois insalubres, sont filmés avec pudeur, ne laissant apparaitre de temps en temps que de simples détails. Cette façon de filmer me rappelle mon regard d'infirmière curieuse lorsque j’entre pour la première dans une maison, où un détail me permettrait presque de cerner celui que je suis venu soigner.

dimanche 18 janvier 2015

Je rêve de chatons-mignons...

Plus de 30 min pour une prise de sang à 8€58 parce que mon patient m'apprend qu'on vient de lui trouver "quelque chose de cancéreux, apparemment c'est pas bon du tout".

45 min passées auprès d'une de mes patientes atteinte d'un cancer (encore une) pour une simple sous cut' à 8€58 parce que ce matin elle n'a pas le moral et qu'elle pleure beaucoup, parce qu'elle doute de son traitement et qu'elle "ne le sent pas bien du tout", parce que son mari pleure également discrètement dans la cuisine de voir sa femme diminuer et qu'il faut prendre du temps pour lui aussi, parce qu'il en a besoin...

Si j'entends encore un média dire qu'on est des fraudeuses, je lui envoie une panier de chatons-mignons (mais féroces) en pleine tête et je lui donne de l'alcool pur pour se désinfecter ensuite !


lundi 20 octobre 2014

L’apprentissage du soin se fait dans la violence.




S’il est un sentiment qui ne me quitte jamais lorsque j’entre seule dans la maison d’un nouveau patient, c’est la petite peur, peut être irrationnelle, de ne jamais réussir à en sortir. Mais cette peur, je la refoule au plus profond de moi, de crainte qu’elle ne m’empêche d’exercer convenablement mon travail d’infirmière. 
Cette crainte de l’agression, j’en ai pris conscience dès mes premiers contacts avec les patients que je soignais alors étudiante. L’accumulation de ces situations, les médias et leurs faits divers ont eu raison de moi et de mon innocence qui ne m’avait pas encore complètement quittée avant d’entrée dans le milieu du soin.

Etudiante, les services hospitaliers, les maisons de retraites et les habitations me sont apparus comme des concentrées de représentations sociales, un microcosme avec ses bons côtés et ses travers.
Étais je si naïve à l’époque que j’ai pu croire un instant que mes soins ne seraient prodigués qu’à de gentilles personnes reconnaissantes ? Rapidement j’ai compris que notre profession n’était pas toujours respectée. Les insultes, les coups, les regards noirs m’ont mis face à l’humain et à son côté le plus sombre : la violence.

Dans un premier temps, c’est la démence qui m’a ouvert les portes de cette agressivité folle.

vendredi 29 août 2014

Je lui ferais presque la bise.


Il y a des maisons dans lesquelles on entre facilement. Des chaumières semblant plus accueillantes. Il y a des patients avec lesquels on aime passer davantage de temps, même si cette idée brise la promesse que je m’étais fixée il y a longtemps. Car il faut bien l’avouer : j’ai des patients avec qui je me lierais bien d’amitié, surtout elle…

- Oooh ! Comme je suis contente de vous revoir, ma p’tite infirmière !

De réponse à mon petit surnom, je suis entrée en lui rendant son grand sourire. C’est le genre de maison où l’on entre par la porte du garage. Toujours ouverte, prête à accueillir le voisin, l’ami, les aller-retours du chien ou l’infirmière venue faire sa visite quotidienne. Ma patiente était dans l’entrée de la cuisine, à peine surprise de mon arrivée tant le canidé, surexcité de me revoir avait prévenu toute la famille. Le mini-chien tournoyait avec joie, lâchant à mes pieds son jouet préféré pour m’inviter à fêter mon retour.

vendredi 4 juillet 2014

Le monde apparait comme un microcosme d’humanité.






Alors que j’étais arrêtée au feu rouge d’un grand carrefour d’hyper-centre, je me suis mise à observer l’humanité qui m’entourait. Il faisait beau avec juste ce qu’il fallait de soleil, il faisait chaud mais pas suffisamment pour appesantir. Comme à mon habitude, j’écoutais de la musique. Cette musique qui rythme mes tournées et mes jours de repos, mes humeurs, mes passe temps, les moments où le temps ne passe pas. La musique c’est un peu mon poumon, mon caisson de décompression.

Je ne sais pas vous, mais moi parfois, lorsque j’observe les gens dans la rue, je les vois comme marcher au ralenti, comme faisant parti d’un clip.

La douce Elo'

- Elle était d’une douceur, tu sais… Je n’en doutais pas et je ne savais pas quoi lui répondre… Quels mots pouvais-je bien trouver...